Research Articles Extension de l'utilisation optimisée des engrais pour une culture durable du maïs
Une journée de démonstration dans le district d'Abeshge, en Éthiopie, a mis en avant l'efficacité des recommandations de fertilisation spécifiques au site (SSFR) pour améliorer la production de maïs. Les agriculteur.rice.s de la région, qui s'appuyaient traditionnellement sur des applications uniformes de fertilisants, ont été impressionné.e.s par la performance des parcelles de maïs traitées avec les SSFR.
Par : Mohammed Ebrahim, Amsalu Tilaye, Tewodros Mesfin et Kalkidan Ayele
L'événement, organisé dans le cadre de l'initiative Ukama Ustawi en Éthiopie, a mis en lumière les avantages des recommandations de fertilisation spécifiques au site (SSFR) pour augmenter les rendements de maïs et améliorer la santé des sols. Les participant.e.s – y compris des agriculteur.rice.s, des agents de développement, des chercheur.euse.s et des représentant.e.s du gouvernement – ont pu observer de première main l'impact positif des SSFR sur la productivité des cultures. Le succès de cette journée de démonstration devrait encourager davantage d'agriculteur.rice.s dans le district d'Abeshge à adopter les SSFR pour la prochaine saison, afin d'augmenter la production, la santé des sols et les moyens de subsistance.
Le maïs est une culture alimentaire de base essentielle en Éthiopie. Malgré son importance, la production de maïs rencontre de nombreux défis, notamment une application inappropriée des intrants, les maladies, les ravageurs et la variabilité climatique. En conséquence, la productivité du maïs reste en deçà des moyennes mondiales, révélant un écart de rendement substantiel entre la productivité actuelle et potentielle. Le maïs, étant une culture exigeante, nécessite des quantités considérables d'azote, de phosphore et de potassium pour atteindre une productivité élevée. Cependant, l'utilisation indiscriminée de fertilisants (sans tenir compte du type de sol, du climat et de l'agroécologie) a entraîné un déséquilibre des nutriments, une acidification des sols et des coûts de production plus élevés. En réponse à ces défis, l'Alliance of Bioversity International et le CIAT – par l'intermédiaire de l'initiative CGIAR Excellence in Agronomy (EiA) – soutient activement la transition de l'approche universelle d'application de fertilisants vers des recommandations de fertilisation spécifiques au site. Cette approche vise à optimiser l'utilisation des fertilisants, à maximiser les bénéfices économiques et à accroître la productivité des principales cultures céréalières telles que le maïs, le sorgho, le blé et le teff.
L'initiative Ukama Ustawi (UU) - Diversification en Afrique de l'Est et australe, vise à étendre des technologies prometteuses et des conseils dans les zones de culture de maïs en Éthiopie. À cette fin, UU a mis en œuvre un projet pilote de mise à l’échelle des recommandations de fertilisation spécifiques au site (SSFR) d’EiA pour la production de maïs dans le district d'Abeshge, zone de Gurage. Dans ce district, les agriculteur.rice.s appliquent traditionnellement des engrais inorganiques, avec des taux d’utilisation qui ont augmenté au fil des années. En moyenne, les agriculteur.rice.s locaux.ales utilisent 600 kilogrammes de fertilisant par hectare de maïs, certains dépassant même 800 kilogrammes. Cette application excessive a réduit la productivité des sols et, dans certains cas, a totalement détérioré la santé des terres. De plus, les services de vulgarisation du district manquent de recommandations scientifiques adaptées au site, à la saison et au contexte pour guider les agriculteur.rice.s vers une utilisation optimale et durable des fertilisants. En conséquence, les agriculteur.rice.s s’inquiètent de plus en plus non seulement de la productivité du maïs, mais aussi de la dégradation de la santé des sols.
Les recommandations de fertilisation sont adaptées aux kebeles spécifiques du district et à la saison de production. Pour les villages pilotes (kebeles) de Chisa et Bido Tadale, la SSFR moyenne était de 180 kg de NPS et de 125 kg d'URÉE. Au total, 110 agriculteur.rice.s ont mis en œuvre la SSFR sur leurs parcelles de maïs couvrant 97 hectares.
Figure 1. Statut du champ de maïs
Étant donné le rôle clé que jouent les services de vulgarisation agricole dans la promotion des technologies améliorées de fertilisation et dans l'éducation des agriculteur.rice.s sur la gestion appropriée des fertilisants pour protéger la productivité des cultures et la qualité des sols, une formation a été dispensée à quatre expert.e.s de district et trois agents de développement sur les recommandations de fertilisation spécifiques au site (SSFR). Lors de la session de formation, Mulat Desalegn, chef du Bureau agricole du district d'Abeshge, a partagé ses réflexions : « Depuis une décennie, notre principale préoccupation a été d'augmenter la productivité. Cependant, dans la quête de rendements plus élevés, les agriculteur.rice.s ont utilisé des quantités croissantes de fertilisants chaque année, ce qui a entraîné de graves problèmes de dégradation des terres. Il est désormais temps pour les agriculteur.rice.s de préserver la santé des sols, de protéger leurs terres et de les transmettre aux générations futures. À cet égard, la SSFR change la donne, permettant aux agriculteur.rice.s d'appliquer des quantités optimales de fertilisants et de récolter de bons rendements tout en maintenant les avantages environnementaux liés à la santé des sols et à la productivité des terres. Protéger les terres aujourd'hui, c'est assurer un héritage sain pour l'avenir. »
Le 3 octobre 2024, une journée de démonstration a été organisée dans le kebele de Chisa, dans le woreda d'Abeshge, pour présenter les avantages des SSFR dans les systèmes agricoles basés sur le maïs. Après avoir délivré les recommandations aux 110 agriculteur.rice.s disposant d'un total de 97 hectares de parcelles de maïs, les participant.e.s ont visité des parcelles de démonstration SSFR et comparé leur performance à celle de la production suivant les recommandations standards.
L'événement a rassemblé 73 participant.e.s des kebeles et de leurs environs, incluant des agriculteur.rice.s (50), des agents de développement (10), des coordinateur.rice.s de recherche et ONG (3), ainsi que des expert.e.s et responsables agricoles du gouvernement (10). L'objectif était d'encourager les agriculteur.rice.s à adopter les recommandations de fertilisation spécifiques au site (SSFR) pour la saison à venir.
Le champ de maïs de 1 hectare d'Asres Amare a été perçu comme un excellent exemple où, grâce aux recommandations de taux de fertilisation spécifiques au site, elle a pu passer d'un taux standard de 600 kg d'engrais urée et NPS à 180 kg de NPS et 125 kg d'urée. Cette approche ciblée a réduit sa consommation d'engrais de près de 300 kg, générant une économie significative d'environ 10 500 Birr éthiopiens par hectare. Malgré cette réduction des intrants en fertilisants, Asres s'attend à ce que sa récolte égale, voire dépasse, le rendement précédent. Ce résultat remarquable est principalement attribué aux taux de fertilisation spécifiques au site, qui prennent en compte la disponibilité saisonnière en humidité pour optimiser l'efficacité d'utilisation des nutriments.
Lors de la visite, les participant.e.s ont été invité.e.s à lever des cartes vertes, jaunes et rouges pour indiquer une différence élevée, une différence légère ou aucune différence en comparant les champs de maïs appliquant les SSFR avec ceux suivant les recommandations standards. Ainsi, 39 agriculteur.rice.s ont levé une carte verte, 6 ont levé une carte jaune et seulement 5 ont levé une carte rouge ; tous les 20 expert.e.s ont levé des cartes vertes.
Figure 2. Maïs classé avec NextGen agro-advisory lors de la journée sur le terrain à Chisa Kebels.
Le chef du bureau du district d'Abeshge et le responsable de l'agriculture ont souligné que le champ pilote de mise à l'échelle a apporté des réponses à leur préoccupation majeure concernant l'optimisation de l'utilisation excessive des fertilisants par les agriculteur.rice.s. Les responsables ont promis de mettre en œuvre les SSFR dans 10 kebeles supplémentaires pour la prochaine saison, avec le soutien technique de l'Alliance. À partir de leur visite, les responsables ont identifié trois avantages majeurs : transférer un sol fertile et sain aux générations futures, réduire les dépenses inutiles en fertilisants et obtenir des rendements prometteurs avec des apports de fertilisants optimaux. Malgré les défis rencontrés dans les kebeles pilotes actuels, ils recommandent d'étendre l'utilisation des SSFR à l'ensemble du district. M. Fikru Argaw - représentant du projet de résilience des systèmes alimentaires en Éthiopie - a souligné les multiples avantages de l'application optimale de fertilisants spécifiques au site pour la santé des sols, notamment le maintien des conditions favorables aux micro-organismes du sol, la prévention de la dégradation de la qualité des eaux souterraines et l'amélioration de la fertilité et de la santé durables du sol.
Les agriculteur.rice.s en visite ont été impressionné.e.s par la performance supérieure de la parcelle de maïs traitée avec les SSFR par rapport aux champs fertilisés selon des applications uniformes. Gebiru Regasa et Abawe Muhammed sont deux agriculteur.rice.s qui ont souligné comment cette journée de démonstration leur a fourni des informations précieuses sur l'optimisation des taux de fertilisants et l'adoption de pratiques fondées sur des preuves pour maximiser les rendements, améliorer la santé des sols et réduire les coûts liés aux fertilisants.
Visite de terrain sur la recommandation d'engrais spécifique au site dans le champ de maïs à chisa kebele, district d'Abeshge.
La journée de démonstration a mis en évidence le potentiel des pratiques agricoles fondées sur des preuves pour augmenter les rendements de maïs et améliorer la santé des sols dans le district, les participant.e.s ayant exprimé un vif intérêt pour la mise à l’échelle de l'application de fertilisants recommandée.
Remerciements
La journée de démonstration a été organisée par le bureau agricole d'Abeshge et l'Alliance of Bioversity et CIAT, grâce au financement disponible du programme Diversification en Afrique de l'Est et Australe (Ukama Ustawi) - MFAT. Nous remercions l'initiative Excellence in Agronomy (EiA) pour la conception de conseils agro-spécifiques au site et adaptés à la saison à mettre en œuvre dans les zones dominées par la culture du blé, du maïs, du sorgho et du teff.
